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DE
YVES KLEIN A… FRED FOREST. LE CHANT DU MONDE, OU (ET) LE CHAMP
DU MONDE ! PAR PIERRE RESTANY
Préface
de Pierre Restany pour l'exposition Fred Forest, " Le champ
du monde ", Galerie Z Editions Nice, Nice 17 février
au 19 mars 1995
Fred
Forest, aventurier, poète, artiste, de la socio-vidéo,
des mass media, du cyberespace et des supports numériques.
On a l'habitude de penser aux autres à travers les
grilles commodes de l'entendement catégorique. Fred
Forest n'échappe pas à la règle. Ce théoricien
praticien de l'art sociologique, co-fondateur de l'esthétique
de la communication est un artiste multimédia dont
le travail s'est exercé sur différents supports,
dans la parfaite logique de sa méthode et dans la perspective
directe de sa démarche qui est une investigation sur
le champ global de la communication.
Si
l'on s'en tient à son utilisation de la vidéo
en tant qu'agent de langage, force nous est de reconnaître
que les activités de Fred Forest en ce domaine, depuis
1968, sont considérables et le placent au tout premier
rang des artistes vidéos français comme pionnier.
Il est en tout cas le premier Français à avoir
pressenti la logique et la cohérence interne du médium
et d'avoir franchi le pas qui sépare la nostalgie de
la prise de vue esthétique ou esthétisante de
l'ouverture du langage des mass media, la prise directe sur
l'information conçue comme un tout, comme la matière
première d'une possible expressivité individuelle.
Il a échappé à l'écueil technique
qui l'aurait voué à une recherche para scientifique
totalement désincarnée. Il a donné une
vie, une sensibilité, une saveur poétique aux
dispositifs multimédias. Cet apport personnel se traduit
par une abondante production artistique où l'humain
est privilégié à tous les stades de la
communication. J'en sais quelque chose, pour avoir collaboré
avec lui à plusieurs reprises. Ce sens de l'humain
chez Fred Forest, au-delà des bonheurs de l'intuition
c'est un supplément d'âme qui passe dans le son
et l'image.
C'est
de la poésie encore !
Au
sein des technologies galopantes, au moment où le processus
technique atteint des zones d'immatérialité
fascinantes, mais aussi combien dangereuses pour un équilibre
de la conscience, alors il est indispensable que l'homme reste
au cœur de toute cette évolution et de toute la science
en général. L'humanisme de masse de Fred Forest
nous permet ce grand espoir.
Yves
Klein avait prévu la grande aventure de l'immatériel
et s'était lui-même aventuré dans le vide.
Le vide d'Yves Klein est le vide d'une vérité
alchimique qui elle aussi est un peu plus vraie que nature.
Au cœur du vide, de ce vide plein, qui est celui du cosmos
et de l'espace intersidéral, celui de la fondation
de l'univers, dans ce vide, avait coutume de dire Yves Klein,
" il y a un feu qui brille et un feu qui brûle". Cette
métaphore pourrait s'appliquer aussi au grand aventurier
de la communication, il y a un feu qui brille, c'est celui
du temps présent de l'intervention et il y a un feu
qui brûle, c'est celui de l'oubli. Je fonde personnellement
un grand espoir dans la démarche de Fred Forest dans
la mesure où je pense que la seconde phase de son travail
et de sa pensée réfléchie, son esthétique
de la communication, débouche sur un humanisme de masse
fondamental, qui est la clé intégrale de notre
propre salut terrestre et cosmique.
Pierre
Restany,
Nice,
février 1995
Pierre
Restany et Mimo Rotella (performance) séminaire Fred
Forest MAMAC (Musée d'Art Moderne et d'Art Contemporain
Nice) Nice, 19 mai 1995
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